Magazine Le Mensuel

Nº 3004 du vendredi 5 juin 2015

Semaine politique

40 000 Palestiniens de Syrie réfugiés au Liban. 98% sont en situation illégale

Une étude menée par l’UNRWA et Tatwir, auprès de 828 familles palestiniennes venues de Syrie au Liban, a été récemment réalisée pour les dénombrer, préciser leurs lieux de résidence et cerner leurs besoins et leurs demandes. Venus essentiellement du camp de Yarmouk et des régions l’entourant, près de Damas, ils seraient actuellement près de 40 000 personnes, vivant principalement dans les camps palestiniens du Liban.

Le nombre de réfugiés palestiniens au Liban venus de Syrie a atteint son apogée au début de 2013. 80 000 personnes ont pénétré sur le territoire libanais, puis les chiffres ont reculé en juin 2014 pour atteindre le nombre de 55 409 individus. Ils seraient actuellement près de 40 000 Palestiniens restés au Liban. Les raisons attribuées à ce recul sont: la décision des autorités libanaises de fermer les frontières entre le Liban et la Syrie pour mieux contrôler et organiser le déferlement des réfugiés, les conditions de vie difficiles auxquelles ils sont confrontés et l’impossibilité de travailler de façon régulière et bien rémunérée. De nombreuses familles sont séparées, certains de leurs membres vivant au Liban et d’autres se trouvant toujours en Syrie. Rentrés de façon provisoire pour s’enquérir de leurs biens et de leurs proches restés là-bas, ils ont été pris par surprise par les nouvelles lois libanaises organisant la rentrée des réfugiés au Liban.
 

La répartition au Liban
Deux cents familles palestiniennes de Syrie vivent dans le camp de Aïn el-Heloué (Saïda), 174 familles dans ceux de Tyr, 100 familles dans Iqlim el-Kharroub (littoral du Chouf), 104 familles dans la Békaa, 150 familles dans les camps du Liban-Nord et 100 familles à Beyrouth. Quelques familles vivent dans les régions périphériques des camps. La plupart des personnes interrogées ont fait part de leur volonté de rester au Liban de façon provisoire en attendant de repartir vers d’autres pays où leurs besoins seraient assurés de façon plus régulière et constante. De quelles régions de la Syrie ces réfugiés sont-ils venus? 344 familles vivaient dans les villages syriens, 278 familles dans le camp de Yarmouk, 18 familles d’Alep et 34 de Homs. Un nombre très restreint est venu de Khan el-Cheikh, Idlib, Tell Kalakh, al-Hajar al-Asouad (Damas), Hassaka, Hama, Daraa, Damas et Raqqa.

 

En attente de papiers
Les déplacements ont débuté en 2013, lorsque le conflit entre l’armée syrienne et les rebelles a atteint son apogée et que les civils sont devenus la cible de bombardements et d’arrestations. Lorsque leurs conditions de vie sont devenues insupportables du fait des exactions commises, de la peur, voire de l’effroi. Un grand nombre d’habitations a été expressément détruit et les camps cernés pour empêcher l’arrivée des rations alimentaires et des aides médicales. Leur trajet de Syrie au Liban a été extrêmement dur, à cause de la longue attente aux frontières, des sommes exorbitantes exigées pour leur assurer le transport des frontières jusqu’aux camps… Pour quelles raisons ces réfugiés ont-ils choisi de s’établir dans un camp et pas dans un autre? Les raisons avancées sont les suivantes: trois cent seize familles ont choisi des camps où elles avaient déjà de la famille ou des proches. Soixante-douze familles ont déclaré être arrivées dans des camps par pur hasard. Cent dix-huit familles ont dit s’être installées dans certains camps du fait de leur proximité avec les frontières syriennes, ce qui facilite leur déplacement entre le Liban et la Syrie. Soixante-deux familles ont choisi des camps où les Palestiniens qui y vivent leur ont promis toute l’aide nécessaire pour faciliter leur intégration. Cent six familles ont choisi les camps où la cherté de vie est moindre qu’ailleurs et soixante-deux autres ont choisi des camps où des logements gratuits leur ont été assurés.
Quels sont leurs besoins essentiels et leurs principales plaintes?
Il n’y a pas de lois précises qui gèrent les permis de séjour des réfugiés, ni de mécanismes automatiques qui renouvellent systématiquement ces papiers. C’est pourquoi 98% des Palestiniens présents sur le territoire libanais y vivent de façon illégale. Ces réfugiés attendent impatiemment que la Sûreté générale ouvre la porte au renouvellement des papiers qui ont expiré depuis belle lurette parce leur situation illégale entrave leur liberté de circulation. Ils craignent d’être arrêtés et abandonnés à leur sort, peut-être même obligés de retourner en Syrie. Quels sont leurs principaux besoins? Ils diffèrent d’une région à une autre. Mais la plupart se plaignent du manque de logements. Quatre cent quatre-vingt-six familles se sont plaintes à ce sujet et quatre cent quarante-huit autres considèrent qu’il y a carence à ce niveau. Les réfugiés entassés les uns sur les autres, dans des conditions extrêmement précaires et des conditions d’hygiène inquiétantes vu la proximité dans laquelle ils vivent. Très rares sont ceux qui peuvent se permettre de louer une habitation vu le nombre très restreint de lieux inoccupés et la cherté des loyers. La seconde difficulté concerne les besoins alimentaires assurés de façon irrégulière, mais qui sont souvent périmés, preuve en est leur date d’expiration. Les opportunités de travail sont presque nulles. Les Palestiniens qui arrivent à décrocher du travail sont très mal payés et sont considérés illégaux: ils sont principalement ouvriers journaliers, chauffeurs, éboueurs… Les prises en charge au niveau de la santé et de l’éducation sont très restreintes.
Toutes les familles interrogées ont assuré avoir enregistré leurs noms auprès de l’UNRWA qui tente d’aider les Palestiniens dans la mesure de ses moyens, en leur assurant notamment des rations alimentaires, des médicaments et, dans les cas extrêmes, en payant des frais hospitaliers indispensables. Dès 2014, près de 1 000 familles n’ont plus reçu d’aide, les responsables de l’UNRWA considérant qu’elles n’en avaient plus besoin. Lors de leur arrivée, les familles ont reçu des matelas, des couvertures, des ustensiles de cuisine, des denrées alimentaires, des jouets, des livres… offerts par plusieurs ONG et des acteurs de la société civile. Avec le temps, toutes ces aides se sont arrêtées sans que des raisons valables ne soient données.

 

Danièle Gergès

Les femmes palestiniennes  
Selon l’étude réalisée, les femmes seraient le maillon faible de la chaîne, proies aux dangers et aux exploitations de toutes sortes, principalement le harcèlement sexuel et la violence verbale, psychologique et physique. 26,40% des familles sont gérées par des femmes et 73,6% par des hommes. Interrogées sur leur sort au Liban, les femmes se disent tristes, effrayées, inquiètes, perturbées et nerveuses. Concernant le mariage précoce des réfugiées palestiniennes mineures, un certain mutisme entoure cette question. Mais il semble que certaines familles encouragent leurs filles, voire les obligent, à contracter des alliances avec des Palestiniens vivant au Liban ou avec des Libanais. 28% des Palestiniens interrogés encouragent le mariage à un âge précoce ce qui, à leur avis, est susceptible de protéger les jeunes filles d’exactions qui pourraient être commises à leur encontre. 54% des Palestiniens ont avoué que les jeunes filles ne sont pas scolarisées au Liban du fait de la cherté de la scolarité et de la difficulté des programmes scolaires et universitaires différents de ce à quoi elles sont habituées. La source de cette étude est l’UNRWA et le centre Tatwir pour les études stratégiques.

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