Magazine Le Mensuel

Nº 3039 du vendredi 5 février 2016

Economie & Finances

Municipalités. Une mauvaise gestion financière

Les municipalités au Liban souffrent d’une mauvaise gestion financière. Voici les conclusions d’une étude menée par l’Institut Bassel Fleihan, mettant en relief les faiblesses de l’opération de collectes des taxes et le peu de diversification des revenus, ainsi que les défaillances des règlements, reflétant une confusion au niveau de la répartition des prérogatives et la faiblesse des compétences des fonctionnaires. L’étude souligne les contraintes administratives et financières qui se traduisent par une irrégularité des versements de la Caisse municipale indépendante et d’autres dus. Un phénomène qui représente un facteur principal de la régression du rôle des municipalités au double niveau des services fournis aux collectivités et de la planification du développement durable. Cette régression du rôle des municipalités s’est accentuée avec l’aggravation de la crise des réfugiés syriens. La consultante des affaires de la gestion des finances publiques, Kawsar Dara, a mis l’accent sur la nécessité de renforcer la transparence financière des municipalités en publiant régulièrement les budgets et les clôtures de comptes. Elle a également insisté sur l’importance que les autorités centrales approuvent des incitations en faveur des municipalités, afin de les encourager à améliorer la collecte des taxes au niveau de la collectivité. Dans cet esprit, elle a proposé la mise en œuvre d’un mécanisme de coordination entre les donateurs pour les projets de développement exécutés en partenariat avec les différentes municipalités dans l’objectif de guider le gouvernement dans son élaboration des politiques nationales de développement durable. «La diversification des sources de revenus est sans doute nécessaire, d’autant qu’elle permet aux municipalités d’être plus flexibles dans leurs actions. Néanmoins, le grand nombre de taxes et la difficulté de les collecter dégradent l’efficacité du système fiscal local», a encore ajouté la consultante.
Abordant les répercussions de la présence des réfugiés syriens sur le rôle des conseils municipaux, une experte du Pnud a fait remarquer que les municipalités et les fédérations municipales sont des fondamentaux autour desquels s’articulent les opportunités de bénéficier des aides internationales et de les canaliser vers des projets efficients. Selon la même source, le Pnud, en collaboration avec le ministère des Affaires sociales, a dépensé 55 millions de dollars depuis 2013 en termes d’aides aux collectivités locales hôtes de réfugiés syriens.

La valeur locative
La taxe sur la valeur locative sur les unités résidentielles et les unités commerciales représente près de 60% de la valeur des taxes directes collectées par les municipalités. Le projet de suppression de certaines taxes, vu la faiblesse de leurs revenus, est le résultat de l’ignorance de l’importance de telles taxes et ouvre la porte devant un chaos administratif et réglementaire.

Micro-finance
La BDL réglemente les comptoirs de crédits

Dans l’objectif de réglementer le secteur de la micro-finance au Liban, la Banque du Liban (BDL) a émis récemment une série de régulations pour contrôler les opérations d’octroi de crédits commanditées par de petites entreprises connues sous le nom de «comptoirs de crédits». Ceux-ci peuvent prendre toute forme légale (joint stock, partenariat…) et fournir de petits prêts (dont le plafond est de 100 000 dollars) en contrepartie d’une quelconque garantie d’une valeur n’excédant pas 120% du prêt. Le corps de ce métier doit se limiter uniquement aux opérations d’octroi de crédits. Le capital minimum requis est de deux milliards de livres libanaises, qui seraient déposés auprès de la BDL. Ces comptoirs ne peuvent, en aucun cas, réduire ce capital ou en faire usage d’une partie. Par ailleurs, à tout moment, les avoirs de l’entreprise devraient excéder ses passifs à concurrence d’un montant au moins égal à celui du capital. Aussi faut-il que ces comptoirs chargent un cabinet d’audit de réputation pour contrôler leurs bilans financiers. Ils devront opérer exclusivement à partir de leurs sièges sociaux et sont interdits d’ouvrir des branches ou des agences dans les régions, à l’exception des cas où ils obtiennent une autorisation explicite préalable de la Banque centrale. D’autre part, la circulaire de la BDL limite les facilités octroyées par le comptoir à un seul de ses clients à un plafond de 5% de son capital, soit 150 millions de livres libanaises. De plus, aucun frais d’ouverture de dossier ne devrait être payé par le client. Toutefois, la circulaire ne mentionne pas la nature des garanties collatérales qui sous-tendent l’octroi de prêts. Néanmoins, elle interdit d’accorder un prêt dont le montant représenterait moins de 60% de la garantie collatérale avancée par le client. Elle interdit également au comptoir d’accepter les procurations de vente (sales proxies) comme garantie collatérale. Par ailleurs, la règle générale de l’emprunt s’applique aux clients des comptoirs de crédits dans le sens où le total des versements mensuels des dettes contractées par un seul client auprès de toutes les institutions financières ne peut dépasser 35% des revenus du ménage. Toujours est-il que les comptoirs ayant opté pour la forme juridique de sociétés par actions ne sont pas autorisés à détenir un portefeuille de crédits dont le montant est supérieur à quatre fois celui de leurs capitaux. Tandis que le montant du portefeuille de crédits des comptoirs qui ont opté pour toute autre forme juridique de sociétés ne doit pas dépasser deux fois celui de leurs capitaux. Enfin, la circulaire interdit aux comptoirs, quelle que soit leur forme juridique, de contracter des prêts auprès des banques ou toute autre institution financière.
La démarche – relativement tardive – de la BDL est intervenue à la suite du scandale qui avait secoué le pays, il y a plus de deux mois, concernant un des comptoirs de crédits qui avait agi comme «un usurier impitoyable», se protégeant en appliquant les dispositions du Code de commerce, alors que les opérations de ces institutions obéissent aux dispositions du Code de la monnaie et du crédit. Les garanties collatérales avancées par les clients étaient démesurées par rapport aux fonds prêtés, alors que les taux d’intérêt pouvaient atteindre parfois 30%.

Liliane Mokbel

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