Après les années de guerre, l’économie tarde à se redresser. Les initiatives privées ont redoré son blason. En 2005, l’assassinat de Rafic Hariri y porte un nouveau coup. En 2008, un rapport de The Economist Intelligence Unit indique qu’en dépit de la paralysie politique, l’économie résiste.
Le pays dépend de plus en plus de l’apport des fonds expédiés par les expatriés libanais, surtout ceux qui travaillent dans les pays du Golfe et en Afrique. Le transfert de fonds est estimé à près de 6 milliards de dollars par an. Avec une dette publique représentant 190% du PIB, la vie économique se résumait aux restaurants et commerces de Beyrouth qui continuaient à prospérer. Les investissements n’ont pas cessé dans l’immobilier et le tourisme a tenu relativement bien. Mais dans le secteur bancaire, les dépôts en devises étaient restés constants. Dans ce tableau, l’Etat était le grand absent. Les organisations économiques ont bougé. Leurs «cris d’alarme» en 2011 et 2012 avaient pour but d’alerter le gouvernement sur la gravité de la situation économique.
La discussion autour de la nouvelle grille des salaires dans le secteur public a mis en alerte le secteur économique privé, qui avait argué du fait que toute augmentation de salaires, conjuguée à une baisse de la croissance, aurait des répercussions négatives sur la macroéconomie. Les institutions internationales et la Banque du Liban (BDL) étaient sur la même ligne.
Les facteurs extérieurs, dus à la crise syrienne, n’ont pas arrangé les choses. Les événements en Syrie ont influé négativement sur l’exportation, car la plupart des produits exportés vers les pays arabes passaient par la Syrie. Cependant, le volume de ces exportations a augmenté en 2012 et 2013 en raison des pénuries sur le marché syrien. Face à cette situation, les organismes économiques réclament un plan de sauvetage et une relance de la productivité, et l’Etat est appelé à y participer. Plusieurs mesures sont envisagées permettant un certain redressement de la situation dans une conjoncture géopolitique tendue, le Liban pouvant compter sur des facteurs clés de son économie pour limiter les dégâts.
Les experts sont d’accord sur deux atouts: un système bancaire solide et le soutien financier des expatriés. La politique de la BDL a permis au pays d’éviter l’effondrement de sa monnaie et de son économie grâce à trois leviers: les banques libanaises solides détentrices en grande partie de la dette libanaise, les volumes importants de transferts d’argent en provenance des émigrés libanais et la récente dynamique des pays du Golfe, qui s’intéressent de plus en plus aux différents secteurs tels que le tourisme ou l’immobilier, très friands du savoir-faire de la main-d’œuvre libanaise, et la baisse du taux d’intérêt sur la dette libanaise.
En attendant une amélioration régionale, il ne faudrait plus compter uniquement sur les secteurs touristique et financier, mais favoriser les autres secteurs à travers leur expansion et une décentralisation de l’emploi.
Le Liban doit mettre en œuvre ses capacités productives. Il serait important d’encourager la consommation et les investissements privés. La BDL a agi à ce niveau en favorisant les offres de prêts à la consommation ou à l’immobilier pour améliorer les chiffres de croissance réelle au Liban. L’Etat peut augmenter les dépenses publiques ou réduire des impôts directs ou indirects. De telles mesures paraissent difficilement applicables vu l’état actuel du déficit public. Toutefois, le gouvernement peut prendre le risque de certaines mesures afin de relancer l’économie, ce qui permettrait d’organiser le déficit. L’Etat peut encourager les entreprises exportatrices, bien que certaines mesures soient compliquées à cause des accords signés avec divers pays. Il peut aussi favoriser une politique de faible taux d’intérêt afin d’encourager la consommation et l’investissement. Néanmoins, de telles mesures doivent être déployées avec précaution, sinon elles risquent d’entraîner une sévère inflation.
Le gouvernement doit aussi faire face à la cherté de vie galopante qui provoque un effondrement rapide du pouvoir d’achat.
Le Liban se trouve toujours au bord du précipice. La conjugaison des efforts des deux secteurs privé et public peut toutefois l’aider à passer le cap.
Arlette Kassas